Charlotte Caragliu

Frozen Motions

Résidence du 4 février au 27 mars 2019

Charlotte Caragliu réalise une nouvelle série d’œuvres sous le nom de Frozen Motions – Vers ces murmures qui ressemblaient à des chimères.

Des moulages de corps en résine et poudre de marbre sont immergés dans les aquariums tels des reliques, des découvertes. Ces sculptures prennent leurs influences via l’esthétique des statues antiques mais aussi via les codes de la société contemporaine. Fantomatiques et divins, ces corps nous dévoilent leurs différences, ils nous racontent une histoire au travers de leur posture et de leur spécificité. Comme victimes d’une sorte d’«arrêt sur image», ils sont placés au cœur d’une nouvelle narration. A travers sa démarche artistique, Charlotte Caragliu cherche à interroger les codes sociétaux pour mettre en avant les marginaux.

Des anecdotes intimes, des faits, des péripéties sont ici retranscrits en volumes, installations, dessins, photographies, textes et performances pour s’adresser à l’universalité. Elle aborde les thèmes du genre, de la mort, de la folie, du « politiquement non-correct » au sein d’une esthétique épurée, poétique. Utilisant l’art comme un moyen de déconstruire les notions de normes telles que nous les entendons, elle tente de perturber le rapport du soi et de sa représentation, du soi et de son rapport à l’autre. Cherchant à sublimer ce qui peut répulser, elle crée une nouvelle esthétique du corps et de ses envies, de l’instant partagé avec autrui.

Le travail de Charlotte Caragliu est une sorte de cabinet de curiosité ou musée contemporain des étrangetés : objets, images, écrits, sonorités, et mise en scène sont mêlés afin d’élaborer un univers particulier retraçant le réel sans tabous.

A propos

Charlotte Caragliu vit et travaille à Montpellier

Pouvez-vous vous présenter, nous parler de votre parcours ?

Je suis sortie de l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Nîmes en 2012, je faisais principalement du volume et de l’installation, dans une démarche plus proche de la notion d’Art et Science, avec déjà une esthétique épurée : peu de couleurs, des matériaux pour la plupart industriels comme du bois, du plâtre, de l’acier et aussi de la résine.

Je faisais principalement du volume et de l’installation, dans une démarche plus proche de la notion d’Art et Science.

J’ai passé mon diplôme (DNSEP) et je me suis consacrée à l’organisation d’événements jusqu’à l’ouverture d’un lieu culturel alternatif à Nîmes, le CRIC, pour mettre en avant la jeune création contemporaine de la région et la mise en place d’un festival, Get Used To Queer.

Je ne me sentais pas de me lancer pleinement dans ma pratique artistique à 24 ans à la sortie de mon cursus scolaire, j’avais besoin de vivre des choses, de rencontrer des personnes de tous milieux et de professions différentes. J’ai d’ailleurs aussi mené beaucoup d’actions pédagogiques du CP au BTS, qui m’ont permis aussi d’approfondir des échanges avec les étudiants liés au processus créatif, de l’idée à la monstration.

Puis, on m’a proposé des expositions, notamment l’année dernière (2018) où Sylvie Logeux m’a invité pour une exposition personnelle dans la galerie Musidora du Lycée Louis Feuillade et dans l’Espace Louis Feuillade qui est une chapelle sublime dans laquelle j’ai eu la chance de réaliser une vingtaine d’œuvres. De là, j’ai fait basculer mes activités vers une démarche de création, plus épanouissante à ce moment-là, bien que l’organisation d’événements m’ait beaucoup appris, c’est un domaine que je préfère mettre de côté pour l’instant.

C’est assez inhabituel d’exposer dans le «Seaquarium Institut Marin», comment avez-vous eu cette opportunité ?

C’est grâce à Sylvie Logeux, ma professeure d’Arts Plastiques au lycée qui a suivi mon parcours. Suite à son invitation d’exposition l’année dernière à Lunel, elle m’a proposé cette opportunité de résidence/exposition au Seaquarium du Grau du Roi. C’est la 5ème résidence d’artiste au Seaquarium.

Ce projet vient d’une volonté de Jean-Marc Groul, le directeur du Seaquarium, de développer différents domaines de recherches au sein de l’établissement : scientifique, artistique et pédagogique.

Et comment se déroule cette résidence ?

Les années précédentes, les artistes réalisaient leurs œuvres directement sur place, pour ma part, nous n’avons pas pu procéder comme ça, il a fallu s’adapter. Pour cette exposition, je réalise des moulages de corps que je coule en résine. L’utilisation de la résine demande des conditions particulières, notamment un espace de séchage dans lequel il n’y a pas de passages à cause des effluves de la matière au séchage. La Ville étant partenaire également de cette action, un appartement est mis à ma disposition au Grau du Roi, j’y moule donc mes modèles en alginate pour les visages, les mains et les pieds et en bandes de plâtre pour le reste du corps.

Ensuite, j’ai la chance d’avoir un atelier à Aigues-Mortes chez des amis, j’y réalise donc les coulages de résine, je démoule au Seaquarium car ils ont des grands bacs qui sont très pratiques pour immerger les moules dans l’eau afin de procéder au démoulage de la résine prise dans le plâtre. Je retourne dans mon atelier à Aigues-Mortes, je les ponce, les assemble, les peins et procède aux couches de finitions.

Comment vous est venue l’idée de réaliser des moulages pour les placer au fond des aquariums ?

Lorsque le projet m’a été proposé et que j’ai revisité le Seaquarium, je n’y étais pas retournée depuis mon enfance, j’ai été à nouveau fascinée par le lieu et par tous ces êtres vivants. J’ai de suite eu envie d’investir les aquariums et de créer des œuvres qui puissent être en interaction avec le milieu marin mais aussi qui puissent être évolutives avec l’écosystème des bacs dans lesquels sont présentés les poissons. Cette envie a défini les matériaux non nocifs que je pouvais utiliser.

L’année dernière, j’ai commencé une série de moulage de corps partiels en alginate et bandes de plâtre, c’était une pratique que j’ai eu envie de développer. Puis j’ai imaginé ces corps blancs au fond des aquariums comme des reliques, des découvertes scientifiques, des œuvres d’arts contemporaines réalisées avec des matériaux contemporains sous l’influence des statues antiques. J’avais envie de raconter une autre histoire, une narration poétique et actuelle pouvant laisser place à l’imagination des visiteurs éclectiques.

Comment avez-vous choisi vos modèles ?

En lien avec ma démarche actuelle. Je m’inspire des personnes qui m’entourent : connaissances, copains et amis. J’aime mettre en avant les marginaux, pour moi c’est une façon de travailler sur l’acceptation de l’autre, quelque soit son genre, ses envies et sa culture. J’ai donc cherché les personnes autour de moi qui avait des malformations ou qui avaient procédé à des transformations corporelles. J’ai eu envie de sublimer de ce que l’on pourrait apparenter comme de la laideur. Montrer le corps tel qu’il est, ce qui va à contre sens de la représentation du corps véhiculée par la société actuelle et notamment au sein de la communication et de la publicité.

Placer des œuvres dans des aquariums est très différent que de travailler dans un espace d’exposition habituel.

Comment se passe l’installation et comment avez-vous mis en place la scénographie ?

En accord avec l’équipe du Seaquarium. J’ai fourni une liste des moulages que je souhaitais réaliser et nous avons choisi des bacs dans lesquels les sculptures ne nuiraient pas aux êtres vivants, où il y avait peu de courants, peu de scénographie déjà mise en place et accessibles à l’équipe des soigneurs/plongeurs. De là, nous avons réparti les pièces.

Et après pour l’installation, c’est assez fou. J’échange avec le plongeur en lui spécifiant comment j’aimerais placer l’œuvre et lui me dit ce qui est possible ou non pour lui. On se met d’accord, il plonge et je communique avec lui via un carnet où je lui donne des indications si besoin.

L’accrochage est donc assez étrange et prenant. Normalement quand on accroche une œuvre, on regarde si ça nous convient, on change d’avis, on replace. Ici ce n’est pas possible car il y a une équipe qui se mobilise pour placer une œuvre et il est délicat de changer d’avis, il faut être sûr dès le début.

Et voir vos premières pièces immergées, ça vous fait quoi ?

Je suis assez émue. Elles prennent une nouvelle dimension. Je ne pensais pas qu’un jour j’aurai eu la chance d’exposer dans le «Seaquarium Institut Marin », c’est insolite. C’est une expérience exceptionnelle.

Remerciements

Le Docteur Robert CRAUSTE, Maire de la Ville de Le Grau du Roi / Monsieur Claude BERNARD, Président de la SEM Seaquarium / Madame Nathalie GROS-CHAREYRE, Adjointe à la culture / Madame Rosine ALLOUCHE, Conseillère municipale déléguée aux droits des femmes / Monsieur Jean-Marc GROUL, Directeur du Seaquarium / Madame Anne-Marie NICOLAS et toute l’équipe du Seaquarium et les biologistes plongeurs / Madame Sylvie LOGEUX, référente du projet

et

Kévin WEBER, Yves BACHE, Cindy GATIMEL, Caroline HERAUD, Quentin DÉE, Laurent BOREL, Thomas Corto VAILLANT, Maxime BOROWSKI, Alex ALLEGRI, Cindy OLIVARES, Clara JORDAN, Rosalie CARAGLIU et SKAN qui ont contribué et accompagné l’artiste lors de sa résidence.

Vidéo Youtube

Rencontre avec l’artiste Charlotte Caragliu, en résidence de création au Seaquarium. Le Seaquarium, pour la cinquième année, laisse l’art contemporain prendre place dans les aquariums…. Des moulages de corps en résine et poudre de marbre immergés dans les aquariums tels des reliques, des découvertes.

Résidence d’artiste dans l’aquarium…


A travers sa démarche artistique, Charlotte Caragliu cherche à interroger les codes sociaux pour mettre en avant les marginaux.

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