Actus scientifiques

Mer Méditerranée, tu te réchauffes encore ?

Le 19 août 2024

Le réchauffement climatique est un enjeu global qui touche divers écosystèmes de manière différenciée. La mer Méditerranée, bien qu’elle ne représente qu’environ 1 % de la surface maritime mondiale, abrite 10 % des espèces répertoriées, ce qui en fait un bassin unique en termes de biodiversité. Cette région, d’une grande importance socio-économique, est particulièrement sensible aux changements climatiques, et les récentes observations indiquent une augmentation de la température de surface de la mer, avec des conséquences potentielles à surveiller de près.

Records de température, la mer chauffe.

Le 15 août 2024, la température médiane quotidienne de la surface de la mer Méditerranée a atteint un record de 28,90 °C, dépassant largement les précédents records, y compris celui de l’été caniculaire de 2003 où la température avait atteint 28,25 °C selon , le post sur X de Justino Martinez, chercheur de l’Institut des sciences de la mer (ICM) de Barcelone et de l’institut catalan ICATMAR.  Ce pic de chaleur, relevé principalement sur la côte égyptienne à El-Arish avec une température maximale de 31,96 °C, s’inscrit dans une tendance inquiétante observée depuis 2022, où la température de la Méditerranée reste durablement élevée. Les données satellitaires du service maritime de l’observatoire européen Copernicus confirment cette surchauffe prolongée, qui pourrait avoir des répercussions graves sur la biodiversité marine.

A ce sujet, le Seaquarium Institut Marin prend la parole et le directeur Jean-Marc Groul s’exprime sur France Bleu ce 19 août , soulignant l’augmentation moyenne de la température de 0.05 degré par an et une tropicalisation de la Méditerranée avec l’arrivée de nouvelle espèces et les conséquences néfastes notamment sur les écosystèmes fixées.

Espèces exotiques envahissantes en Méditerranée

Le réchauffement de la mer Méditerranée favorise le déplacement des populations d’espèces marines vers le nord, un phénomène mécanique observé de plus en plus fréquemment. Cela entraîne l’apparition de certaines espèces qui étaient auparavant plus rares ou limitées aux régions méridionales de la Méditerranée. Par exemple, des espèces comme les barracudas, la girelle paon de méditerranée méridionale, et les balistes, autrefois confinées aux eaux plus chaudes du sud, se rencontrent désormais plus fréquemment dans les zones septentrionales, provoquant des interactions nouvelles entre les courants marins du sud et du nord.

La Méditerranée fait face à une forte croissance d’espèces exotiques, souvent introduites par l’activité humaine. Par exemple, l’huître creuse ou encore le crabe bleu qui ont envahi le bassin de Thau à cause des pratiques de transport maritime, notamment via les eaux de ballast des navires. Ces espèces ont, de plus, un impact écologique et économique important dans les lagunes de Méditerranée.  Parmi les algues, Asparagopsis armata et Caulerpa taxifolia sont particulièrement problématiques. Caulerpa taxifolia se propage en clonant un seul individu à travers toute la Méditerranée, tandis que Caulerpa cylindracea, se reproduit sexuellement, rendant son contrôle difficile.

Pour plus d’informations, consultez la page du projet ALIEN OCCITANIE.

Depuis 2021 le CPIE Bassin de Thau anime le réseau Alien Occitanie. Ce réseau a pour objectif de mobiliser et partager les informations liées aux espèces non indigènes marines (ENI). Il vise également à mobiliser une large communauté d’usagers de la mer (plongeurs, pêcheurs loisirs, plaisanciers, usagers du littoral…) à participer à la remontée de données de plusieurs ENI. Ces observations viendront en compléments des suivis déjà effectués et permettront également de déployer une veille sur de nouvelles arrivées d’ENI. Le réseau permet ainsi de capitaliser et partager ces informations auprès des nombreux acteurs déjà impliqués sur cette thématique, pour apporter des éléments de réponses aux enjeux de lutte et de gestion des ENI marines.

Le Golfe du Lion : Un reflet de la diversité thermique de la Méditerranée

Bien que les chiffres soient alarmistes et les médias adeptes du sujet, il est important de préciser que le Golfe du Lion, situé dans le nord-ouest de la Méditerranée, est l’une des zones les plus froides de cette mer. Cette caractéristique résulte principalement des vents dominants, tels que le mistral et la tramontane, qui soufflent fréquemment du nord et du nord-ouest. Ces vents provoquent des remontées d’eaux froides des profondeurs vers la surface, un phénomène appelé « upwelling, » observé presque toute l’année dans cette région.

Les recherches menées par l’Ifremer et le Parc Naturel Marin du Golfe du Lion mettent en évidence l’importance de cette zone pour la biodiversité marine. Le refroidissement constant des eaux crée un environnement propice à une grande variété d’espèces adaptées à des conditions plus fraîches.

Des études récentes, telles que celle de François Poisson et al. (2024), montrent que le Golfe du Lion sert de nurserie pour les requins peau bleue, soulignant ainsi l’importance de cette région pour la conservation des espèces.

A lire aussi : https://www.seaquarium.fr/fr/les-actions-de-preservation/requin-peau-bleue/

Le Seaquarium Institut Marin : Un acteur des suivis de la biodiversité

Conscient des enjeux liés à ces écosystèmes, le Seaquarium Institut Marin s’est engagé dans des suivis réguliers pour inventorier la biodiversité marine dans le Golfe du Lion et sur le littoral gardois. Ces efforts sont importants pour établir un point de référence permettant d’évaluer l’impact du réchauffement climatique sur cette région. Le directeur, Jean-Marc Groul, souligne l’importance de ces suivis dans la surveillance des écosystèmes marins, avec l’ambition de faire du Seaquarium une véritable sentinelle du réchauffement climatique en Méditerranée.

Grâce à ces initiatives et des équipes en action sur le terrain, le Seaquarium Institut Marin aspire à devenir un acteur clé dans l’observation des changements biologiques et climatiques et dans la mise en place d’actions de protection justifiées.

 « À l’avenir, avec un atlas de la biodiversité solide, nous pourrions prétendre à devenir des sentinelles du réchauffement climatique »

affirme Jean-Marc Groul.

Conséquences à court terme et pour cet automne ?

Une température plus élevée de la Méditerranée pourrait également influencer les conditions météorologiques régionales. Météo-France a indiqué qu’une mer plus chaude favorise une évaporation accrue, augmentant ainsi la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère. Cela pourrait rendre les épisodes méditerranéens, comme les épisodes cévenols, plus intenses, surtout durant l’automne. Bien que ces changements méritent d’être surveillés, ils ne devraient pas être perçus comme inévitables ou catastrophiques.

Le réchauffement de la mer Méditerranée doit être abordé avec une perspective nuancée. Si certaines tendances relevées par les médias sont préoccupantes, d’autres, comme la résilience du Golfe du Lion, montrent que des zones maritimes peuvent maintenir leur biodiversité malgré les changements climatiques.

Le Seaquarium Institut Marin, par ses initiatives de suivi, de sensibilisation et de conservation, joue un rôle d’observateur et d’acteur majeur dans la protection de ces écosystèmes. Grâce aux divers projets avec des associations, des institutions de recherche (IRD, Ifremer, Université de Montpellier, CNRS) et à un engagement public fort par le volet « sciences participatives » nous pouvons contribuer à préserver ces écosystèmes pour les générations futures.

Le Seaquarium Institut Marin : Suivi, Sensibilisation, et Conservation

Au Seaquarium Institut Marin, nous sommes profondément engagés dans la protection et la conservation des écosystèmes marins, en particulier ceux situés dans la région du Grau-du-Roi et du Parc Naturel Régional de Camargue. Notre mission repose sur trois axes principaux : le suivi scientifique, la sensibilisation du public, et la mise en place de mesures concrètes pour la conservation de la biodiversité marine.

Protéger et Éduquer

Notre travail ne s’arrête pas au suivi. Le Seaquarium Institut Marin est également dédié à la sensibilisation du public à travers des missions éducatives dans les campings, aquariums, et lors d’événements locaux, des ateliers, des ramassages de déchets, par le pôle médiation scientifique.  Selon l’équipe de médiatrices : « La conservation commence par la connaissance, nous partageons régulièrement nos découvertes et les enjeux liés à la protection des oiseaux, des fonds sableux, des requins, de la laisse de mer et des herbiers marins avec le grand public. »

Le Seaquarium Institut Marin est bien plus qu’un aquarium ; c’est un centre de culture scientifique et un acteur clé du territoire dans la protection et la sensibilisation autour des écosystèmes marins. À travers nos efforts de suivi, de conservation, et d’éducation, nous nous efforçons de garantir un avenir durable pour l’ensemble de la biodiversité côtière.

Pour lire la Publication scientifique de François Poisson sur les requins Peau bleue en Méditerranée – Stellaris

Publication de François Poisson sur le Golfe du Lion, zone de Nurserie pour les requins peau bleue : Poisson Francois, Demarcq Herve, Coudray Sylvain, Bohn Jens, Camiñas Juan Antonio, Groul Jean-Marc, March David (2024). Movement pathways and habitat use of blue sharks (Prionace glauca) in the Western Mediterranean Sea: Distribution in relation to environmental factors, reproductive biology, and conservation issues . Fisheries Research , 270, 106900 (17p.) . https://doi.org/10.1016/j.fishres.2023.106900

Aide à la rédaction: Jean Marc Groul, directeur Seaquarium Institut Marin – Patrick Louisy, Biologiste marin Scientifique spécialisé dans l’étude des poissons, photographe sous-marin – Marion Broquere, cheffe de projets Mer et Littoral CPIE BASSIN DE THAU

Contact rédaction : elodie@seaquariumpro.fr

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