Avec GIS Posidonie et le Parc Naturel Régional de Camargue
La semaine dernière, les équipes du Seaquarium Institut Marin ont rencontré les agents du Parc Naturel Régional de Camargue et les membres de GIS POSIDONIE sur 2 journées entières pour partager les protocoles et les connaissances autour des méthodes de suivi des herbiers marins.
Le Grau du Roi abrite des herbiers de zostères, composés notamment de la plante marine : la Zostère naine (Zostera noltei), formant des prairies sous-marines essentielles pour l’écosystème côtier.
Les herbiers marins, en plus de fournir des habitats essentiels et de stabiliser les sédiments, jouent un rôle important dans les cycles biogéochimiques du carbone, de l’azote et du phosphore. Leur importance écologique, combinée à leur sensibilité aux perturbations environnementales, explique la mise en place de mesures de surveillance renforcées.
Avant la construction du port de Camargue en 1980, ces herbiers étaient présents dans la région, mais ils ont subi des impacts significatifs lors des travaux d’aménagement. En effet, les interventions côtières, comme tout aménagement sur le littoral, entraînent une mise en suspension des sédiments, réduisant ainsi la disponibilité de la lumière, élément indispensable à la photosynthèse et, par conséquent, au développement des herbiers. Toutefois, plusieurs années plus tard, des premiers signes de recolonisation par les herbiers ont été observés dans le golfe de Beauduc au début des années 2000, ainsi qu’au Grau-du-Roi en 2010.
Afin de mieux comprendre et suivre l’évolution de ces herbiers, un suivi annuel au Grau-du-Roi est en cours par les équipes du Seaquarium Institut Marin.
Cette étude a pour objectif d’évaluer leur état de santé, leur densité, leur diversité spécifique, ainsi que leur étendue spatio-temporelle. Les chargés de cette mission utilisent également l’imagerie aérienne pour cartographier ces écosystèmes, et réalisent des recensements réguliers des espèces présentes. Parallèlement, divers paramètres environnementaux sont mesurés pour évaluer la structuration et la vitalité des herbiers. Ce suivi vise à recueillir des données pour mieux envisager et mettre en place les mesures de protection, sensibilisation, et conservation, et une gestion plus durable des écosystèmes.
Mais quelles sont ces plantes marines à protéger ?
Suivi des herbiers en collaboration avec le Parc naturel régional de Camargue et GIS POSIDONIE
Première Journée : suivi des herbiers au Grau-du-roi
Depuis 2019, le Seaquarium Institut Marin suit les herbiers marins de cette région. Lors de cette mission, les équipes du Seaquarium Institut Marin représentées par Chloé Espinosa, océanographe de formation et médiatrice scientifique chargée de cette mission au Seaquarium, accompagnée de Léna Collet, technicienne LIFE MARHA au Parc naturel régional de Camargue et de Patrick Astruch, ingénieur de recherche au GIS POSIDONIE, se sont rendus sur la plage sud et l’épi nord du Grau-du-Roi.
Deux protocoles de suivi ont été appliqués :
- Protocole GIS POSIDONIE :
- Suivi visuel sur un transect de 100 m pour recenser les poissons.
- Suivi par quadrats pour observer les invertébrés.
- Évaluation de la densité par quadrats avec mesure des feuilles.
- Protocole du Seaquarium Institut Marin :
- Recensement des espèces avec un haveneau sur plusieurs transects de 10 m.
- Évaluation de la densité et de la vitalité de l’herbier sur ces mêmes transects.
État de l’herbier lors de cette mission
Les équipes ont constaté que l’herbier était fonctionnel et riche en faune et flore, en bonne santé, avec des conditions météorologiques favorables (eau à 29°C). Cependant, une forte fréquentation touristique sur l’épi nord a été notée, impactant l’herbier.
C’est un site remarquable car on retrouve cet herbier de zostère naine en mer ouverte.
Patrick Astruch – Ingénieur de recherche – GIS POSIDONIE
L’herbier de zostère naine (Zostera noltei) est suivi depuis 2019 par le Seaquarium. Sur le site de la Plage Sud du Grau-du-Roi, les équipes n’ont pas observé de zostère marine (Zostera marina) cependant des brins flottants de Ruppia cirrhosa (plante marine) ont été retrouvés.
Seconde Journée : Suivi des herbiers au sein du Parc Naturel Régional de Camargue
Le Parc naturel régional de Camargue (PNRC) anime 2 sites Natura 2000 avec des zones maritimes : « Bancs sableux de l’Espiguette » et le site « Camargue ». Au sein de ce dernier, il gère depuis 2013 deux sites de protection renforcée dans le Golfe de Beauduc : un cantonnement de pêche et une zone de protection de biotope. C’est dans cette dernière que se trouve un herbier de zostères, protégé par le parc. La création d’une zone de cantonnement de pêche, interdisant toute forme de pêche, a permis de réduire considérablement les infractions (pêche illégale aux arts traînants) dans le golfe, contribuant ainsi à la préservation des fonds marins et des populations de poissons. Quant à la zone de protection de biotope, elle protège l’herbier grâce à plusieurs arrêtés y interdisant l’ancrage des bateaux, l’utilisation d’engins de pêche raclant les fonds marins, ainsi que la pratique du kitesurf. Les agents du Parc de Camargue assurent le suivi, la surveillance et la gestion de ces deux sites protégés.
La pointe de Beauduc constitue une zone d’intérêt écologique majeure. Elle abrite une biodiversité remarquable, notamment en mollusques, et sert de nurserie pour les poissons. La zone est en perpétuelle évolution, la pointe de Beauduc avançant jusqu’à 15 mètres par an. Cette dynamique côtière influence directement les écosystèmes présents, dont l’herbier de zostères.
Dans le Golfe de Beauduc, l’herbier de zostère est réapparu en 2005 et les mesures assurant sa protection sont en vigueur en 2013, parallèlement à l’établissement du cantonnement de pêche. Ces deux mesures complémentaires visent à préserver un herbier en évolution, composé de zostère naine (Zostera noltei), de zostère marine (Zostera marina), de Ruppia ( Ruppia Cirrhosa) et de Cymodocée (Cymodocea nodosa). Cet herbier joue un rôle essentiel pour la biodiversité, offrant un habitat et une source de nourriture pour de nombreuses espèces. Il contribue également à la stabilisation des fonds marins et à l’oxygénation de l’eau. Notamment, l’herbier abrite une population de Grande Nacre (Pinna nobilis), une espèce protégée malgré la forte mortalité observée en Méditerranée due au pathogène Haplosporidium pinnae.
À Port Gardian, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, Chloé et Cannelle, expertes scientifiques et médiatrices au Seaquarium Institut Marin, ont rejoint les agents du Parc Naturel Régional de Camargue et Patrick Astruch de GIS POSIDONIE.
Application du protocole GIS POSIDONIE
Cet herbier mixte dominé par les zostères naine et marine a été étudié selon le protocole de GIS POSIDONIE.
Les équipes se sont rendues dans la zone du Golfe de Beauduc, où l’herbier s’étend sur 12 hectares, pour identifier les espèces présentes et enregistrer les positions GPS des grandes nacres.
Identification de Zostera noltei : – Présences de feuilles fines et peu longues de couleur vert clair. – Feuilles avec 3 fines nervures parallèles. – Extrémité à bord lisse. – Rhizome blanc verdâtre mince (2-5mm de diamètre). – Profondeur de 0,1m-1,5m de profondeur).
Identification de Zostera marina : – Présence de feuilles vertes et rubanées large de 4-10mm. – 3-5 nervures parallèles et longitudinales. – Rhizome enfoui dans le sédiment.
Comparaison des herbiers
La comparaison à long terme entre un herbier situé dans une zone non protégée (plage du Grau-du-roi) et un herbier dans une zone protégée (Golfe de Beauduc) serait particulièrement intéressante.
Les relevés effectués ont révélé une présence massive de diverses espèces de poissons. Grâce à l’utilisation du haveneau lors du protocole de suivi mené par le Seaquarium Institut Marin au Grau-du-Roi, des syngnathes (Syngnathus acus), appartenant à la même famille que les hippocampes, ont été identifiés. Bien que ces poissons soient également présents en grand nombre à Beauduc, ils n’ont pas été observés lors de l’application du protocole de l’association GIS Posidonie, qui ne comprend pas l’utilisation du haveneau et repose uniquement sur l’observation visuelle.
Il est important de noter que les deux herbiers n’ont ni la même ancienneté ni la même fréquentation touristique. L’herbier de Beauduc, peu perturbé par le tourisme, a montré des signes de bonne santé et une biodiversité riche. Les équipes ont observé et recensé de nombreuses pontes, notamment de gastéropodes et de lièvres de mer (Aplysia depilans), ainsi que la présence de zostère naine (Zostera noltei), de zostère marine (Zostera marina), et de la grande nacre (Pinna nobilis), une espèce rare et protégée.
Conclusion et perspectives
Conclusion et perspectives
Ces rencontres et échanges permettent une première approche comparative entre les deux herbiers. Ils favorisent le partage de connaissances entre les acteurs impliqués et seront réitérés pour poursuivre les retours d’expériences sur les suivis initiés par le Seaquarium, le Parc Naturel Régional de Camargue et GIS POSIDONIE.
Remerciements :
- Patrick Astruch, GIS POSIDONIE
- Léna Collet, Parc Naturel Régional de Camargue
- Ecogardes – PNRC
- PROGRAMME LIFE MARHA